Camille, une jeune Parisienne, partage son expérience de cette tendance mode qui se répand, en particulier parmi les jeunes.
Porter pour rendre : une stratégie économique
Camille a adopté le « wardrobing » pour contourner les limites financières imposées par ses parents. L’idée de dépenser une somme considérable pour des tenues portées occasionnellement ne l’attirait pas. Elle a commencé son aventure dans les enseignes de fast fashion, où elle a rapidement constaté la facilité de rendre des vêtements sans que les caissiers n’inspectent minutieusement chaque article.
Du fast fashion à la luxe accessible et variété de profils sociaux touchés
La pratique du « wardrobing » évolue, et certains adeptes comme Camille osent franchir les portiques des marques de luxe accessibles. Malgré les risques accrus et les marques plus regardantes, ces individus réussissent à contourner les soupçons des vendeurs. Camille, forte de son expérience, maîtrise désormais toutes les subtilités de cette pratique.
Le « wardrobing » ne se limite pas à une seule catégorie sociale. Des jeunes professionnels, tels que Clément, actif dans la finance, avouent recourir à cette pratique plusieurs fois par an. Pour eux, il s’agit d’une façon de s’adapter à des occasions spéciales ou de maintenir une image sur les réseaux sociaux. Même dans des secteurs prestigieux tels que la production audiovisuelle ou les médias, le « wardrobing » fait des adeptes, comme le témoigne Julia, animatrice télé.
Bien que le « wardrobing » puisse sembler anodin, ses conséquences économiques sont significatives pour les enseignes de prêt-à-porter. La chercheuse Regina Frey estime que la fraude aux retours peut réduire jusqu’à 20% la rentabilité globale d’un détaillant. Une étude de la National Retail Federation évalue à 7,8 milliards de dollars par an les pertes engendrées par les retours frauduleux, même lorsque les articles sont retournés en bon état.
Facilités de retour et silence du secteur
Les pratiques anti-« wardrobing » demeurent marginales dans le secteur du prêt-à-porter. La suppression des frais de retour, les délais de rétractation prolongés et les facilités de remboursement contribuent à la popularité croissante du « wardrobing ». Certaines marques ont introduit des mesures, telles qu’une deuxième étiquette voyante, mais la plupart se contentent d’une seule étiquette, facilement dissimulable.
Les principales enseignes du prêt-à-porter restent silencieuses sur le phénomène. Sollicitées, elles n’ont pas souhaité s’exprimer sur le « wardrobing ». Cependant, lutter efficacement contre cette pratique pourrait signifier se priver de ventes, ce qui pose un dilemme pour l’industrie de la mode. La fast fashion, axée sur le volume, peut difficilement s’opposer à une pratique qui, même pour de mauvaises raisons, assure une probabilité élevée de conserver le vêtement acheté.
Au-delà des considérations économiques, le « wardrobing » a des conséquences écologiques importantes. Les retours massifs, qu’ils concernent des vêtements portés ou non, contribuent à des émissions de carbone considérables. En 2019, aux États-Unis, les retours d’articles ont généré une émission carbone de 15 millions de tonnes. Les marques, conscientes de cette réalité, commencent à révéler l’impact environnemental de ces retours. Asos, par exemple, indique que 12% de ses émissions totales de carbone proviennent des retours clients.
Destruction des articles retournés : une pratique obscure
Un aspect moins évoqué du « wardrobing » concerne la destruction des articles retournés. Bien que certaines enseignes affirment adopter des pratiques durables, une partie importante des articles retournés finit souvent dans les décharges. Selon Regina Frey, jusqu’à 25% des retours sont détruits par les détaillants. Pour les vêtements déjà portés, cette proportion pourrait atteindre 100%, car il est souvent moins coûteux pour les détaillants de se débarrasser des articles indésirables que de les stocker ou de les rafraîchir pour une revente.